Episode 2
Le célèbre Vieux Port
Par Michèle
Le mythe de la fondation de Marseille.
L'histoire millénaire de Marseille, terre d'accueil et carrefour de cultures, commence grâce aux Phocéens qui la fondent au 600 av. J-C. Massilia deviendra ainsi le centre du prospère empire commercial grec en Provence, conquis au I siècle av. J-C.
Il était une fois Gyptis et Prôtis :
Contrairement au désir de son père Nanos, Gyptis la Celte, n’épousa pas un prince gaulois, mais Protis, le jeune grec aventurier en 600 avant notre ère. Image emblématique de la princesse qui choisit son futur époux, comme la légende de la Belle Hélène.
Selon la légende ce fut le premier couple gallo-grec, qui eut une terre, en cadeau de mariage, pour fonder une ville Massalia, qui est la plus ancienne ville de France.
Il y a deux versions de la légende sur la création de Massalia, celle Aristote et l'historien romain Justin. Mais les deux versions racontent, malgré leurs différences, toutes deux le mariage de Gyptis et de Protis.
Plusieurs hypothèses s'affrontent pour expliquer l'origine de ce mythe, les fouilles, autour du Lacydon et dans le quartier du panier, attestent la présence de grecs.
Vestiges grecs du Lacydon
Version d'Aristote : fragment de « La Constitution des Massaliotes »
Traduit en français par Georg Kaibel.
« Les Phocéens qui pratiquaient le commerce en Ionie fondèrent Massalia. Euxène, le Phocéen, était l'hôte du roi Nanos (tel était son nom). Ce Nanos célébra les noces de sa fille alors que par hasard Euxène était présent. Il l'invita au banquet. Le mariage se faisait de cette manière : il fallait qu'après le repas l'enfant entre et donne une coupe de boisson tempérée à qui elle voulait des prétendants présents. Et celui à qui elle aurait donné la coupe, celui-là devait être son époux.
L'enfant entre donc et, soit par hasard soit pour une autre raison, donne [la coupe] à Euxène. Le nom de l'enfant était Petta. À la suite de cet événement, comme le père acceptait qu'il eût la jeune fille en pensant que le don avait été fait avec l'accord de la divinité, Euxène la reçut pour femme et cohabita, changeant son nom (à elle) en Aristoxène. Et il y a à Massalia une famille issue de cette femme, encore maintenant, appelée Prôtiades. Car Prôtis fut le fils d'Euxène et d'Aristoxène. »
Version de l’historien romain Justin :
Ce récit de la fondation de Massalia a été écrit par Justin, un historien romain. Ce texte date du 2ème siècle après J-C soit 800 ans après la fondation de Massalia
"À cause d'un territoire petit et peu fertile, les habitants de la cité grecque Phocée étaient plus des marins que des agriculteurs. La pêche, le commerce et même la piraterie leur donnaient de quoi vivre.
Vers 600 avant J-C, des Phocéens naviguent loin sur la mer Méditerranée, se battant au passage contre des peuples barbares. Arrivés près de l'embouchure du Rhône, les Phocéens sont séduits par la beauté de ces lieux et décident de revenir avec une troupe plus nombreuse pour fonder une cité.
Les chefs grecs se nomment Simos et Prôtis. Ils vont trouver Nannus, le roi des Ségobriges qui contrôle le territoire pour lui demander son amitié.
Ce jour-là, le roi prépare le mariage de sa fille Gyptis. Selon la coutume de ce peuple, le roi doit la donner en mariage à l'homme que Gyptis choisira pendant le festin. Tous les prétendants de Gyptis sont là et le roi invite aussi ses hôtes grecs. Gyptis arrive et son père lui dit d'offrir de l'eau à celui qu'elle veut pour mari. Alors, laissant de côté tous les autres, elle se tourne vers les Grecs et présente l'eau à Prôtis. Devenu gendre du roi, Prôtis reçoit en cadeau de son beau-père une terre où il fonda Massalia.
Pourquoi les Grecs fondent ils la colonie de Massalia ?
Description de Massalia par l’historien romain Strabon :
« Marseille est une fondation des Phocéens. Elle est située sur un terrain rocheux. Son port se trouve au pied d'une falaise en amphithéâtre qui regarde vers le midi. Elle est solidement fortifiée, de même que l'ensemble de la ville dont la dimension est considérable. Sur l'acropole sont fondés l'Ephésion et le sanctuaire d'Apollon Delphinien, l'Ephésion est le temple réservé à l'Artémis d'Éphèse. En effet, alors que les Phocéens partaient de leur patrie, un oracle, ditons, leur tomba du ciel qui disait de prendre pour chef de leur navigation un guide reçu d'Artémis d'Éphèse. »
Toute l'histoire prouve que les Grecs ont fondé Marseille en accord avec les Ségobriges, (les Ségobriges faisaient partie des peuples celto-ligures).
Ces Grecs venus de la cité de Phocée, en Ionie (L'Ionie (en grec ancien Ἰωνία / Iônia) est une région historique du monde grec antique située dans l'ouest de l'Asie Mineure, entre Phocée au nord et Milet ...) Phocée est donc la métropole de Massalia. Celle-ci est située à proximité du delta du Rhône : c'est l'actuelle ville de Marseille.
Vers 1200 av. J. -C., la Laconie (La Laconie (en grec ancien Λακωνική / Lakōnikế) est une région historique de Grèce, située à l'extrême sud-est de la péninsule du Péloponnèse) reçoit un flux de nouveaux arrivants, les Doriens, qui seraient entrés en Grèce par l'Illyrie et l'Épire. Une partie d'entre eux passent en Étolie, traversent le golfe de Corinthe, posent pied dans le Péloponnèse puis atteignent la vallée de l'Eurotas, où ils fondent Sparte.
Massalia est une cité grecque indépendante, de sa fondation vers 600 av. J.-C. à la prise de la ville par César en 49 av. J.-C. Elle joue un rôle de première importance dans la redistribution des produits méditerranéens le long des côtes de la Gaule et de l’Ibérie, en s’appuyant sur une série de comptoirs, d’Agde à Nice. Ses marins, comme le célèbre Pythéas, s’enhardissent au-delà des colonnes d’Hercule (le détroit de Gibraltar) pour voguer dans l’Atlantique Nord à la recherche de gisements d’étain ou vers le sud, le long des rivages africains pour le navigateur Euthymènes. Rivale de Carthage et alliée de Rome de longue date, elle joue un rôle peut-être dans la première guerre punique (264-241 av. J.-C.), assurément au début de la deuxième guerre punique, au moment de la bataille de Sagonte, en 219 av. J.-C. Vers - 125, la pression des tribus gauloises contraint les Massaliètes à faire appel à Rome, ce qui amènera la fondation de Narbonne et la création de la province de Gaule transalpine, la Narbonnaise. Dotée alors d’un territoire considérable, elle est au sommet de sa prospérité.
Qui était Phythéas ?
Né à Massalia vers 350 av. J-C, Pythéas quitte sa ville natale vers 330 avant J-C. à bord d'un navire d'une vingtaine de personnes dont l'objectif officiel était de chercher de l'étain et de l'ambre et l'objectif caché de vérifier que tout au nord, du fait de la courbure de la terre, le soleil ne se couchait plus.
Grand explorateur, Pythéas a atteint des contrées polaires, où il a observé qu'au solstice d'été, le Soleil ne se couche pas. Ses relevés astronomiques et ses mesures géographiques, des latitudes et des distances terrestres, par exemple, sont remarquablement précis.
« Pythéas de Marseille, ce grand pilote, assurément l’un des plus grands explorateurs que l’Histoire ait connus. Il affirma et proclama l’existence des îles Britanniques. Il fut traité en conteur de mensonges, et ce n’est que longtemps après la disparition du monde où avait vécu ce grand pilote, qu’on se prit d’admiration pour les découvertes qu’il y avait faites. »
Winston Churchill, Premier Ministre anglais, 1874-1965.
En mémoire de cet explorateur, on peut observer une représentation sur la façade de la chambre de commerce et la rue Pythéas coincée entre la Rue Saint Saëns et la rue Bailli de Suffren, tout près de l’Opéra et de la Canebière, en prolongement de la rue Beauvau.
De Massalia à Massilia : la ville romaine
« Les Marseillais, sur l’ordre qui leur en est donné, nous remettent les armes et les machines de guerre, font sortir les vaisseaux du port et des chantiers, livrent l’argent du trésor. Ces choses faites, César laissa subsister la ville, considérant plutôt son nom et son antiquité que sa conduite envers lui. »
Jules César, général et homme d’État romain, Ier siècle avant J.-C., Guerre civile, II, 22
Massalia est conquise par Jules César et son légat Trébonius en 49 av. J.-C. La ville perd alors son indépendance politique mais reste un port actif et conserve très longtemps son caractère de ville grecque. L’habitat se développe dans l’ancienne zone portuaire. On y trouve un forum dallé, un théâtre de tradition grecque et, plus à l’est, un vaste édifice thermal. En bordure du plan d’eau du Lacydon, comme le nomment des auteurs latins tardifs, apparaissent de vastes entrepôts, des horrea (Un horreum (pluriel horrea) est un entrepôt de l'époque romaine. (Bien que le terme latin évoque souvent le grenier à grains, les horrea étaient également utilisés pour stocker d'autres types de biens). En dépit d’une romanisation progressive qui se manifeste par la progression du latin, l’architecture et le décor des maisons et les usages funéraires, l’héritage grec se perpétue dans la trame urbaine, ses orientations et ses « quartiers ». Il se manifeste également par l’usage fréquent de la langue grecque sur les inscriptions. Sur l’ancien territoire agricole, de grandes habitations littorales ou rurales (villae) montrent une campagne romanisée où l’on cultive la vigne, l’olivier et les céréales. Marseille, comme Arles, participe à la paix romaine en Méditerranée, l’essor des échanges en est une conséquence particulièrement bien documentée avec les épaves et leurs cargaisons.
La Rome Antique:
Si la chute de Marseille devant les légions de César, en -49, a d’importantes conséquences d’ordre politique et économique pour la cité, les répercussions immédiates sur le tissu urbain demeurent plus discrètes, hormis la disparition de l’arsenal. Ce n’est que quelques décennies plus tard, sous Auguste, que Marseille est véritablement transformée et entre « formellement » dans le monde romain.
Le port romain prend une importance, l’extension des faubourgs se développent, ainsi que le commerce. D’énormes entrepôts à dolia (grosses jarres) se créent. On utilise ces jarres de 1000 à 2000 litres de capacité pour le transport du vin en vrac et de l’huile.
La découverte d’une tablette de bois pyrogravée, atteste du dynamisme commercial de la ville.
L’entrée de Marseille dans le monde romain ne lui a donc pas ôté sa raison d’être, le commerce, et la ville reste largement ouverte sur les échanges méditerranéens.
Que reste-t-il de cette époque?
Quelles empreintes a laissé cette période sur la ville actuelle :
La rue Pythéas : coincée entre la Rue Saint Saëns et la rue Bailli de Suffren, tout près de l’Opéra et de la Canebière, en prolongement de la rue Beauvau.
La Bourse Les terrains « derrière la Bourse », à quelques dizaines de mètres du fond du port actuel, ont livré dès le début du XXe siècle de nombreux vestiges antiques, dont le « mur de Crinas ». Des travaux de construction réalisés à partir de 1967 ont révélé au public l'importance du site et occasionné une polémique sur leur destruction programmée. Première grande fouille d'archéologie urbaine française, cette opération aboutira à la préservation et à la présentation au public d'un certain nombre de vestiges antiques au sein de l'actuel « jardin du Port antique ».
Mur de Crinas
Derrière la Bourse, se situe le Musée d’histoire de Marseille avec des trésors pour les yeux.
La place Jules-Verne La fouille a été réalisée en milieu humide sur une surface de 3 700 m² et une épaisseur de sédiment archéologique de 8 m. La principale difficulté résidait dans la gestion du niveau de la nappe phréatique par les archéologues : il fallait en effet conserver le milieu anaérobie le plus longtemps possible pour la préservation de toutes les matières organiques – notamment les bois qui composaient les bateaux – tout en fouillant en milieu « terrestre ».
Environnement géographique :
Marseille est entourée de collines qui forment le "poumon vert" de la ville. Les massifs de la Nerthe (au Nord-Ouest), de l'Etoile (au Nord), du Garlaban (au Nord-Est), de Saint Cyr-Carpiagne et de Marseilleveyre (au Sud) encerclent l'agglomération.
Quelques chiffres pour prendre de la hauteur : Marseilleveyre : 432 mètres ; le mont Puget :563 mètres, point le plus haut du massif littoral de roches calcaires des Calanques et le mont Carpiagne, 646 mètres, point culminant du Parc national des Calanques. Ce dernier s’étend sur 20 kms entre Marseille et Cassis.
Autour de Marseille se situent un ensemble de quartiers-villages, les Accates, les Camions, Eoures, la Valentine, Saint-Menet, la Treille et Allauch, dans ces collines merveilleuses autour de Marseille.
« Ce n'est pas une montagne, mais ce n'est plus une colline » : ainsi Marcel Pagnol décrivait-il les reliefs autour de Marseille. Dans ce paysage hybride aux multiples richesses se dévoile une Provence plus terrestre que maritime.
Entre collines et vallées, coule une rivière, l’Huveaune, sur son parcours, ce fleuve côtier arrose ses rives, pour se jeter dans la mer. Cette vallée de l’Huveaune est la limite nord du Parc National et la limite des Calanques.
Port des Goudes, début du Parc National des Calanques.
Cet espace est l’interface entre ville et nature aux multiples facettes : garrigue, pinèdes, forêts, vignes, plaines, cols, prairies (reste de l’activité agricole pastorale) et un mélange industriel, canal, domaines, bastides, villas d’artistes, villages, hameaux, campus universitaire, construction de grandes copropriétés du XXème siècle et camp militaire…
A bientôt pour un nouvel épisode, de l'antiquité à la cité médiévale.