La rubrique de Michèle: Raconte moi Marseille

Par Michèle

 

Raconte-moi Marseille !

Épisode 1 Du Paléolithique à la Révolution française

                                                      2 600 ans d'histoire, résumée par épisode, de la Ville de Marseille, que nous allons agrémenter de multiples dérives tout au long de cette découverte.

Marseille avant Marseille : une très longue histoire

« Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas »
Lao-tseu, philosophe chinois, vers 600 av. J.-C.

Nous commençons notre récit au Paléolithique supérieur. Le site le plus connu des Marseillais et celui de la Grotte Cosquer.
Si nous regardons le Mésolithique (du IXe au VIe millénaire av. J.C.) nous avons des traces nombreuses du passage de l’Homme dans notre bassin. (Pasteurs et paysans en migration vers notre région).
Ce qui permet d’introduire en Provence le blé et l’orge, le mouton et la chèvre domestiques, la pierre polie et la céramique. Ces peuplades passent du côté nomade, chasseurs-cueilleurs à la sédentarité. Une évolution du VIe au IIIe millénaire av. J.-C., se forme et modifie à la fois le paysage, passe à l’âge du Bronze, pour passer à l’âge du Fer et se regrouper dans les bassins en village ou sur des sites fortifiés.
Parmi ces sites, on trouve la Tourette, Saint-Marcel, habitat des Ségobriges. Nous irons également à la rencontre des Gaulois de la légende de Gyptis et Prôtis.

 Entre 40 000 et 10 000 ans avant le présent : Le Paléolithique supérieur

Le Paléolithique supérieur est une période de la Préhistoire qui se développe en Europe avec l’arrivée des premiers Homo sapiens, il y a près de 45 000 ans. Le climat est froid, la faune et la flore sont adaptées à ces températures basses. Les chasseurs-collecteurs Homo sapiens vont développer divers outils, techniques de chasses et structures d’habitats pour s’adapter à cet environnement. Il y a près de 10 000 ans, le climat va se réchauffer, ce qui marque la fin du Paléolithique.

La Grotte Cosquer

Elle est fréquentée et décorée de 33 00 bp à 19 000 bp avec deux grandes phases presque ininterrompues. C’est grâce à 60 datations au carbone 14 sur 41 échantillons prélevés entre 1992 et 2012 que les précisions sur ces périodes sont connues.

Pour se donner un ordre d’idées, les premières fréquentations de la grotte Cosquer sont contemporaines aux dernières fréquentations de la grotte Chauvet. Quant aux dernières fréquentations, elles sont proches de celles de la célèbre grotte de Lascaux.

A titre indicatif, voici les fréquentations d’autres grottes principales :la grande Grotte d’Arcy-sur-Cure (28 000 bp – Yonne), les grottes de Cussac (29 000 bp – le Buisson-de-Cadouin, Dordogne), du Pech-Merle et (29 000 bp – Cabrerets, Lot) de Cougnac (30 000 bp – Payrignac, Lot).

Le saviez-vous ? BP sont les initiales de Before Present signifiant « avant le présent ». Elle est utilisée à la place de « av. J.-C. » (avant Jésus Christ) pour compter les années vers le passé. Mais ce « présent » est fixé à l’année 1950. Ainsi 7800 ans BP signifie 5850 av. J.-C.

La grotte Cosquer, ornée à une époque où la mer était à plusieurs kilomètres, se retrouve aujourd’hui envahie par les eaux du fait de ces changements climatiques. La grotte devient inaccessible à pied d’homme depuis près de 9000 ans. Ce lieu, protégé durant des millénaires, reconnu désormais comme patrimoine archéologique est donc voué à disparaître.

Pourquoi l’appelle-t-on Cosquer ?

A partir de 1985, Henri Cosquer fait ses premières incursions dans la grotte à partir de la calanque de la Triperie au Cap Morgiou.

Avant ces premières incursions contemporaines, cette grotte était vierge de toute présence humaine depuis près de 20 000 ans. Son accès se fait par une entrée (l’entrée originelle) située à 37 mètres de profondeur et en suivant un boyau submergé qui remonte et débouche sur la « plage » de la Salle 1.

Après la découverte des peintures, Henri Cosquer déclare ce site au DRASSM (Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines). 

Une première expertise de la grotte est menée à la demande du ministère de la Culture. Elle est conduite par le préhistorien Jean Courtin, rejoint par Jean Clottes et confirme l’authenticité des peintures et gravures. À partir de prélèvements de charbon de bois, Jean Courtin établit une première datation. Il s’agit bien d’un site paléolithique.

 Le 2 septembre 1992, la grotte est classée au titre des monuments historiques.

 En 2019, la société Kléber Rossillon est choisie par la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur pour la conception, la construction de la restitution et l’exploitation de la grotte et du centre d’interprétation pour une durée de 25 ans.

Depuis 2021, le préhistorien Cyril Montoya a été missionné par le ministère de la Culture (direction générale des patrimoines et de l’architecture) pour diriger une nouvelle étude pluridisciplinaire de la grotte, composée d’une quinzaine de scientifiques, archéologues, karstologues, hydrogéologues …

Ouverture au grand public de Cosquer Méditerranée: la réplique de la grotte préhistorique sous la mer a lieu le 4 juin 2022.

 

Site contenant la réplique de la grotte Cosquer

 

Saint Marcel

L'occupation du site de Saint-Marcel a une origine très ancienne. Des abris sous roche datant du paléolithique ont été mis au jour sur le flanc nord du «Baou de Saint Marcel », sur la rive droite de l'Huveaune.

Aux environs de l'an 600 avant notre ère, une communauté de ségobriges (celto-ligures) construit un village fortifié sur le plateau, qui domine la vallée là où elle est la plus étroite, resserrée entre les collines du massif de Saint Cyr et les contreforts du massif du Garlaban. Cet oppidum, le plus ancien de la région, contrôlait les passages entre la colonie grecque de Massalie et l'est de la Provence. Renforcé à plusieurs reprises, il avait une activité économique importante comme en témoignent les traces de constructions, de voirie, et les restes de poterie retrouvés récemment. Il a été le plus longtemps occupé, puisqu'il ne fut détruit par les Romains qu'à la fin du II ème siècle avant JC.

À la fin du XIV ème siècle, la seigneurie de Saint-Marcel, partie de la baronnie d’Aubagne, était propriété de François des Baux, qui la légua à sa nièce Alix. Ondon de Villars, époux et tuteur d'Alix, en fit donation en 1402 à son neveu Philippe de Lévis, dans le cadre du règlement d'un accord avec Raymond de Turenne.

L'origine du nom du village n'est pas sûre, il est possible que Marcel soit une déformation de Marcelie à l'époque où ce nom tendait à se substituer à celui de Massilia. Marcelie dériverait de Castellum Massilliense, nom du château qui était implanté sur la rive sud de l'Huveaune. Le préfixe Saint aurait été accolé, comme ce fut le cas très souvent en Provence, au moment de l'engouement religieux de l'ensemble de la région.

Ce site se visite uniquement lors des journées du patrimoine.

 

L'esplanade de la Tourette et la peste.

La place offre l’un des panoramas les plus connus de Marseille, face à la Basilique Notre Dame de la Garde et au Vieux Port, une vue visible sur toutes les chaînes d’information évoquant la Cité phocéenne ! Ce site emblématique est aussi une des portes d’entrées du Mucem (Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, via la passerelle du Fort Saint Jean depuis l’église Saint Laurent.

Esplanade de la Tourette

L’esplanade de la Tourette a vu ses habitants périr durant la peste de 1720, comme beaucoup d’autres quartiers marseillais.

Un personnage connu de Marseille, Nicolas Roze (chevalier), dégagera l’esplanade de la Tourette de ses morts, ce qui en fera notamment un de ses faits marquants. Pour accomplir cette tâche, le Chevalier Roze fait ouvrir deux anciens bastions dans le quartier de la Tourette et y jette les cadavres, présentant à peine forme humaine, avec l’aide d’une compagnie d’environ cent cinquante soldats et forçats. Sa statue y est à découvrir au pied de l'Eglise Saint Laurent à côté de celle du dresseur d'ourson. Une rue à Marseille porte son nom.

Rue du Chevalier Roze

L’affaire de la Tourette :

C’est un épisode de la Révolution française qui s’est produit à Marseille et s’étale entre le mois d’août 1789 et le mois de mars 1790. Pendant cette période, l’aristocratie et une partie de la haute bourgeoise mènent une offensive contre le mouvement patriote et populaire pour les empêcher de retrouver la vigueur dont ils ont fait preuve au printemps 1789. Le matin du 19 août 1789, de mystérieux placards manuscrits, signés « Sans Soucy », sont trouvés aux coins des rues de Marseille appelant les membres de l’ancienne garde citoyenne à se rassembler à l’esplanade de la Tourette. Personne ne vient, sauf la foule qui accueille la garde bourgeoise avec des huées et des sifflets lorsque celle-ci arrive à la Tourette venant du Cours en fin d’après-midi. Perdant leur sang-froid, les gardes bourgeois tirent alors sur la foule, blessant une quarantaine de personnes et tuant trois personnes, dont le brigadier Garcin de la garde bourgeoise. Alors que la garde bourgeoise s’est volatilisée, l’émeute s’étend dans tout le centre de Marseille.

Maison de l'échevin

La maison de l’échevin de Cabre (consul, négociant et échevin) située aux abords du Vieux Port et de l’Hôtel de Ville, est pillée et des meubles sont brûlés dans la rue. On arrêtera quarante-trois pillards et incendiaires ou présumés tels. Le comte de Caraman, commandant en chef de Provence, essaie de prononcer une harangue pour calmer les esprits, mais il est obligé de s’enfuir pour ne pas être molesté par la foule. À dix heures du soir, la loi martiale est proclamée et, nonobstant les privilèges de la cité, les dragons et les Suisses entrent dans Marseille pour réprimer l’émeute et ramener le calme. Il y eut encore des attroupements le lendemain devant les forts Saint Nicolas et Saint-Jean pour demander la libération des personnes incarcérées dans les émeutes de la veille, mais ils furent dispersés par les régiments d’Ernest-Suisses et du Royal-la-Marine.

Après les destructions occasionnées par la seconde guerre mondiale, la reconstruction du vieux port s’est déroulée en plusieurs phases avec notamment l’opération de la Tourette ou îlot de la Tourette en 1953. Deux immeubles barres ainsi qu’une tour ont été développés pour accueillir près de 260 logements.